25ème RST: conférences, ateliers, table ronde
Conférences:
Au cours de la matinée, nous avons assisté à deux conférences. La première de M. Michel Ballèvre et la seconde de Jean Louis Mugnier.
M. Michel Ballèvre (Professeur en Sciences de la Terre à l’Université Rennes I, directeur UMR 6118, Gesociences Rennes) nous a présentés une conférence intitulée : « processus d’édification d’une chaîne de montagne (dans les pas d’Emile Argand) ».
Cette conférence nous a permis de découvrir un nouveau scénario de l’orogénèse alpine présenté dans un article de Manzotti et al, publié en 2014.
Nous avons ainsi pu apprendre que l’océan alpin était bien moins large qu’on pouvait le penser à l’origine. Il a existé sur une période courte de 10 à 20 millions d’années et la largeur maximale devait être de l’ordre de 100 à 200km.
Pour l’élaboration de ce nouveau modèle, trois choix ont dû être faits concernant :
1- La position de l’initiation de la subduction
2- L’absence de signature d’un arc calco-alcalin dans la région / absence de magmatisme explosif car le manteau n’a pas pu être suffisamment métasomatisé.
3- L’origine du magmatisme oligocène / détachement avec la racine lithosphérique ?
M. Ballèvre nous a invités à la prudence dans l’interprétation du lien entre profondeur et pression dans les diagrammes pression-température. Actuellement un débat est ouvert concernant cette relation.
M. Jean-Louis Mugnier (directeur de recherches, Institut des Sciences de la Terre à l’Université Savoie Mont-Blanc) nous a présentés ensuite une conférence intitulée : « L’évolution des reliefs de la Terre sous l’effet des processus d’altération, d’érosion, de transport et de sédimentation ».
Le conférencier est parti de deux exemples : le massif du Nanga Parbat dans la chaine himalayenne et le massif du Mont-Blanc dans les Alpes.
Le Nanga Parbat culmine à 8126 mètres et est toujours en croissance à la vitesse de 1 mètre / siècle. Parallèlement, il subit une érosion intense estimée à plus de 22 kilomètres d’épaisseur disparue, permettant à des granites d’anatexie appartenant à la croute inférieure, âgés entre 1 et 10 millions d’années d’apparaître aujourd’hui en surface. La vitesse d’exhumation est estimée entre 6 et 10 mm/an.
Il nous a expliqué comment les scientifiques pouvaient estimer la vitesse d’incision de l’Indus dans le massif et donc comparer une vitesse de surrection à une vitesse d’érosion.
L’étude du Mont-Blanc nous a permis de comprendre la dynamique glaciaire à travers les études lithologiques (fragments rocheux découverts en bas de glaciers) et minéralogiques (zircons).
Enfin, nous avons découvert l’impact des crues quotidiennes liées à la fonte glaciaire ou à la rupture de poches d’eau comme en Août 2014.
Nous avons été accueillis l’après-midi au Lycée Malherbe pour deux ateliers sur les thèmes des Risques majeurs et de l’eau puis pour la table ronde « Enseigner les Géosciences dans le Secondaire ».
Messieurs Olivier Maquaire, Stéphane Baize, Frédéric Gresselin et Alain Orange nous ont présenté leurs recherches, les ressources en ligne concernant les risques majeurs dans la région normande.
Nous avons découvert que si la montée des eaux marine était un problème majeur, elle s’accompagne d’une remontée des nappes phréatiques en arrière des défenses côtières ce qui risque de ruiner les efforts de protection réalisés
M. Jérôme Gueller nous a présenté un travail d’EPI réalisé au collège Villey-Desmeserets de Caen sur le thème de l’eau. Ce travail a été très apprécié des collègues présents
M. Didier Palissière, technicien supérieur de laboratoire au Lycée Pierre Corneille de Rouen, a présenté un modèle de nappe et un autre concernant le traitement des eaux usées.
Finalement l’après-midi s’est achevé avec une table ronde autour du thème «Comment enseigner les Geosciences dans le secondaire ?»
La présence et la participation active de Messieurs Jean-Marc Moullet, Inspecteur général de l’éducation nationale en SVT et de Pascal Thiberge (IA-IPR de Caen) ont été très appréciées de la part des participants.
A cette table ronde ont également participé M. Antoine Lamache, géologue et responsable du développement chez Eurovia ; M. Sandric Lesourd, maître de conférences en Sciences de la Terre à l’Université de Caen ; M. Pierre Savaton, maître de conférences en Histoire des sciences à l’université de Caen ainsi que M. François-Xavier Mesierz et M. Christophe Croquelois
Cette table ronde a été divisée en deux périodes :
1- Chaque intervenant a présenté ses « positions »
2- La parole a ensuite été donnée au public pour échanger.
Notre objectif était simple, susciter une réflexion autour de la relation entre l’élève et les « Géosciences ». La diversité des acteurs présents à cette table (Inspecteurs, enseignants, universitaires, professionnels) pouvaient permettre une discussion sur le thème de l’Enseignement des Géosciences depuis le cycle 2 jusqu’à l’entrée dans la vie active avec une thèse de doctorat. C’était donc une occasion de braquer les projecteurs sur les forces mais aussi les faiblesses de l’Enseignement des Géosciences en France et donc de susciter une réflexion dans cette période de grand changement.
Plusieurs éléments sont ressortis :
1- La place du réel dans l’enseignement des Sciences de la Terre. Tout au long des deux jours, les différents intervenants professionnels et universitaires ont insisté sur le fait que l’enseignement de la Géologie devait partir du terrain et donc de la « roche ».
Les inspecteurs ont reconnu assez facilement l’importance du réel dans l’enseignement. Faire des sorties de terrain dans le cadre des EPI est une bonne solution. Il convient d’avoir l’aval du conseil d’administration de l’établissement.
Les sorties et/ou les voyages « obligatoires » ne reviendront pas dans le BO pour deux raisons :
a- Si une discipline obtient ce droit, pourquoi empêcher les autres d’en faire autant ?
b- Une sortie devient gratuite pour les élèves si elle est validée par le conseil d’administration de l’établissement selon le principe de « l’éducation gratuite pour tous »
Le traitement des données collectées peut se faire dans le cadre de travaux pratiques et/ ou de l’accompagnement personnalisé comme nous l’a montré M. Gueller.
2- Les professionnels ont insisté également sur le fait que les élèves ne savaient pas lire une carte géologique. Ils ont insisté sur le retour de la cartographie dans les enseignements. Les enseignants notamment au cours du sondage réalisé ont montré que les notions d’espace et de temps étaient très difficiles à appréhender par les élèves.
3- Le désintérêt de la géologie par de nombreux élèves :
Le désintérêt de nombreux élèves pour les Géosciences, n’a probablement aucun rapport avec les programmes ou la façon de les mettre en œuvre. Plusieurs axes semblent ressortir de nos réflexions :
1- La perception initiale du vivant et du non-vivant par le tout-petit créée une « empreinte » résiduelle chez l’individu en construction qui reste en arrière-plan. En d’autres termes, « l’animal c’est génial, la plante c’est moyen et la roche c’est sale, on ne doit pas la mettre en bouche ». M. Thiberge a proposé l’idée d’un travail avec des neurologues pour éclaircir ces points : l’acquisition des « notions d’espace-temps » et de la « relation vivant- non vivant » au cours du développement de l’individu. Il y a peut-être quelques enseignements à en tirer.
2- La perception des Géosciences par les enseignants. Si un enseignant n’apprécie pas les Géosciences, manque de confiance dans ce domaine, rien ne l’empêche de traiter un thème rapidement voire de le reporter l’année suivante.
Cet aspect a été largement développé. Nos collègues ont montré qu’il y avait un risque dans le système des cycles mis en place au collège. Comment vérifier qu’une partie de programme de géosciences n’a pas fait l’objet d’une impasse au cours du cycle ou, n’a pas fait l’objet d’un traitement à la légère (…) ? Une inspection ne permet pas de voir la progressivité de l’enseignement sur le cycle, de consulter la trace écrite laissée dans les cahiers sur tout le cycle. Comment vérifier que la notion inscrite sur le cahier de texte de Pronote a bien été étudiée l’année passée ? Un collègue est-il responsable de la trace écrite laissée par son (ou ses) prédécesseur(s) ?
3- La méconnaissance des ressources locales. Lorsqu’un enseignant arrive dans une région, il ne connaît pas les sites intéressants pour son enseignement. Nous avons donc insisté sur le fait qu’il fallait mettre des formations en Géologie dans le Plan Académique de Formation. M. François-Xavier Mesierz a insisté sur le fait que l’APBG proposait des stages de terrain tout au long de l’année
M. Moullet a finalement conclu que comme la génétique, la difficulté d’enseigner les Géosciences provenait probablement de la complexité intrinsèque aux Sciences de la Terre en elles-mêmes. Pour être géologue, il faut également être à la fois géographe, physicien, chimiste, biologiste… et donc manier avec une certaine facilité des concepts provenant d’une multitude de Sciences. Cela peut faire peur à un élève et à un enseignant.
La table ronde s’est achevée au bout de 1 heure. Nous avons quitté la salle avec une certaine amertume. Plusieurs points n’ont pas pu être évoqué mais, après tout, il s’agissait de susciter une réflexion qui espérons-le aboutira à quelque chose…
Remarques :
► Les conférences devraient mises en ligne pour le début janvier 2017.
► Les pdf des présentations des ateliers et de l’excursion devraient être disponibles début Décembre, sur le site académique